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chinastral/conte/fable31 - Lu Ban Premier maître des Charpentiers

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05082020

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chinastral/conte/fable31 - Lu Ban Premier maître des Charpentiers  Empty chinastral/conte/fable31 - Lu Ban Premier maître des Charpentiers




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PARTIE I

La rivière d'eau limpide tournait vers l'est pour arroser un village nommé Lujiawan. Un vieux charpentier qui s'appelait Lu y habitait. Il avait 58 ans et exerçait son métier depuis quarante ans. Travaillant laborieusement, il avait construit deux villages: Lujiawan du Sud et Lujiawan du Nord. Il avait une habitude que les gens trouvaient bizarre: Ne jamais accepter d'apprentis.
Quand quelqu'un voulait apprendre le métier avec lui, il répondait toujours:
"Mon niveau n'est pas assez élevé pour que j'enseigne aux autres. Regardez les maisons que j'ai construites et les malles que j'ai faites: elles ne sont pas belles."

Au bout de quelques temps, on connut sa réponse habituelle et ne lui demandait plus rien.

Le vieux charpnetier n'était toujours pas satisfait de sa technique. Il ne prit jamais d'apprentis et en arriva à ne pas vouloir apprendre son métier à ses propres fils. Il faisait des économies et avait pu rassembler trois cents taëls d'argent et acheter trois beaux coursiers afin d'envoyer ses fils chercher un bon Maître.

Il avait trois fils: l'aîné s'appelait Lu Shuan, le deuxième Lu Bin et le cadet Lu Ban, notre héros qui avait alors 12 ans.

Les deux aînés étaient aussi paresseux l'un que l'autre et passaient leurs journées à ne rien faire. Ils ne faisaient jamais leurs devoirs. Leurs parents ne les aimaient pas du tout.

Par contre, Lu Ban était diligent et studieux dès son enfance. Il suivait son père pour l'aider dans son travail. Un jour, au moment du déjeuner, sa mère s'aperçut qu'il avait disparu depuis longtemps. Inquiète, elle le chercha partout et le trouva devant une maison que l'on finissait de construire. Accroupi, les mains sous le menton, il regardait attentivement les charpentiers qui fabriquaient des fenêtres.

PARTIE II

A l'âge de six ans, il voulait déjà travailler avec une hache ou une scie pour couper du bois en carreaux ou en planches. A dix ans, il savait se servir de tous les instruments.
Ne lâchant jamais la hache, il faisait beaucoup de petits objets, comme un petit meuble, un petit banc ou un mini-chariot qu'il déposait partout dans la maison, lui donnant l'aspect d'un magasin de meubles.

Voyant que sa mère filait péniblement sur le lit, il alla couper un saule dans la montagne, en fit une chaise et il dit:
- Maman, assieds-toi sur la chaise pour filer, tu n'auras plus mal aux reins.

Il s'aperçut aussi que sa soeur n'avait rien pour poser le panier de fils quand elle cousait, il coupa du bois d'orme et en fit un coffre.

Mais quand ses frères lui demandaient de faire quelque chose, il refusait toujours et leur disait:
- Le bois et la hache sont prêts, pourquoi ne le faites-vous pas vous-mêmes?

Ses parents et sa soeur l'aimaient beaucoup.

Les trois fils grandissaient de jour en jour.

Un jour, le vieux charpentier fit venir l'aîné et lui dit:
- Mon fils, te voilà grand, tu ne peux pas dépendre toujours de ton père. Il te faut apprendre un métier: être charpentier. Mais ma technique n'est pas assez bonne pour que je te l'apprenne et je ne l'ai jamais apprise à personne. Tiens, prends ces cent taëls d'argent et ce cheval, va trouver le grand Maître qui vit dans la montagne Zhongnan.

Cela dit, il s'aperçut que son fils paresseux faisait triste mine. Sans rien dire, ce dernier prit l'argent, monta sur le cheval et s'en alla en se balançant.

Lu Shuan se dit:
"La montagne Zhongnan est si loin d'ici, comment puis-je trouver le Maître?"

Il vagabonda alors n'importe où sur le cheval et trois ans plus tard, les mains vides, l'argent dépensé et le cheval vendu, il rentra tout seul à la maison.

Hors de lui, le vieux charpentier sans un mot le mit à la porte.

PARTIE III

Il fit venir alors son second fils et lui dit:
- Mon fils, tu as maintenant 18 ans. Prends ces cent taëls d'argent et le cheval, va chercher le grand Maître charpentier à la montagne Zhongnan. Ne reviens pas comme ton frère qui n'a rien appris.
D'un air mécontent, Lu Bin prit l'argent, monta sur le cheval et partit en sanglotant. Il marcha pendant un jour et une nuit. Découragé en apprenant qu'il y avait encore plus de 5000 kilomètres à faire pour aller à la montagne Zhongnan, il se laissa aller au gré de sa fantaisie.

Au bout de trois ans, ayant dépensé tout l'argent et vendu le cheval, il rentra à la maison en haillons. Fou de colère, son père prit un bâton, l'en frappa, et le chassa de la maison.

Vint alors le tour de Lu Ban. Son père, les larmes aux yeux, dit en lui caressant la tête:
- Mon enfant, j'ai chassé tes deux frères qui ne sont bons à rien. Il ne me reste que toi sur qui compter. Ne me désespère pas complètement, surtout, ne fais jamais comme tes frères...

Sans attendre que la phrase fût finie, Lu Ban répondit:
- Papa, sois tranquille, j'ai déjà préparé de l'argent et le cheval. Je suis tout prêt et n'attends que tes recommandations. Si je ne trouve pas le Maître, je ne rentrerai pas te voir.

Prenant congé de ses parents, Lu Ban monta sur le cheval et se dirigea vers l'ouest. Le vieux charpentier regarda son fils s'éloigner, essuya ses larmes et s'exclama:
- C'est bien mon petit Lu Ban.

PARTIE IV

Lu Ban accéléra sa course et parcourut en une journée 150 kilomètres. Dix jours plus tard, il avait fait 1500 kilomètres. Il arriva devant une haute montagne escarpée parsemée de pierres pointues et où poussaient des brousailles.
Lu Ban arrêta son cheval et ne sut que faire. A ce moment-là apparut un vieux bûcheron. Lu Ban le salua et demanda:
- Grand-père, combien de kilomètres y a-t-il d'ici à la montagne Zhongnan?

- Tu n'arriveras même pas à mi-pente en un an puisqu'elle est si haute, répondit lentement le vieux.

- Je passerai alors deux ans, et même trois ans à la grimper. Je ne reculerai jamais avant d'arriver au sommet! dit Lu Ban.

Le vieux bûcheron, admirant sa fermeté, lui dit en souriant:
- Prends ma faucille, tu t'ouvriras un chemin avec.

Très content, Lu Ban prit la faucille et commença à escalader la montagne. Il mania la faucille et des brousailles et des pierres pointues s'écartèrent. Il arriva ainsi rapidement au sommet. Accrochant la faucille sur un gros arbre, il monta sur son cheval et continua sa marche vers l'ouest.

Lu Ban continua à marcher pendant dix jours, il parcourut 1500 kilomètres, et arriva devant une large rivière. La couleur de l'eau était si foncée qu'elle sembalit très profonde. Lu Ban arrêta son cheval et hésitait.

Un petit bateau apparut alors sur lequel était assis un jeune pêcheur. Lu Ban le salua et lui demanda:
- Mon frère, à combien de kilomètres est la montagne Zhongnan?

Le pêcheur réfléchit et répondit:
- Si tu marches tout droit, il y a 1500 kilomètres, si tu fais un détour, ça fait 3000 kilomètres. Pour prendre le chemin le plus court, il faut traverser cette rivière.

- Mon frère, peux-tu me transporter sur l'autre rive? demanda Lu Ban.

- Non, je ne le peux pas. Beaucoup de passagers s'y sont noyés depuis l'Antiquité, refusa le pêcheur en fronçant les sourcils.

- Rien ne me fait peur, ni la profondeur de l'eau, ni la largeur de la rivière. Je ne reculerai jamais avant d'avoir traversé la rivière! dit Lu Ban.

Voyant son inflexibilité, le pêcheur sourit et dit:
- Mon frère, viens sur le bateau avec ton cheval. Je vais te faire passer de l'autre côté.

PARTIE V

Ayant traversé la rivière, Lu Ban se remit en route et au bout de dix jours il avait parcouru 1500 kilomètres de plus. Il arriva alors devant une haute montagne et se dit:
"Ce doit être la montagne Zhongnan."
Il y avait beaucoup de monts sur lesquels serpentaient de nombreux sentiers. Lequel prendre? Il découvrit au pied de la montagne une maison devant laquelle une vieille dame filait. Il s'adressa alors à elle, en la saluant:
- Grand-mère, à combien de kilomètres est la montagne Zhongnan?

- Il y a 50 kilomètres en marchant tout droit et 150 kilomètres en faisant un détour. Mais parmi les trois cents monts, lequel veux-tu atteindre? répondit la grand-mère.

- Je voudrais chercher le grand Maître charpentier, répondit joyeusement Lu Ban.

- Prends celui du milieu parmi les 999 sentiers, fit la vieille dame.

Après avoir exprimé ses remerciements, Lu Ban compta les sentiers et se dirigea vers celui du milieu. Arrivé au sommet du mont, il aperçut des toits de maisons à l'orée d'un bois. De plus près, il vit qu'il y avait une maison de trois pièces.

Poussant légèrement une porte, il vit de vieux instruments de charpentier jonchant le sol. Jetant un coup d'oeil sur le lit, il vit un vieillard aux cheveux blancs endormi les jambes étendues.

Son ronflement était aussi sonore que le tonnerre. Lu Ban se dit:
"Ce doit être le grand Maître."

Sans le réveiller, il ramassa les instruments et les mit dans une caisse à outils. Puis il s'assit silencieusement sur un banc et attendit le réveil du Maître.

PARTIE VI

Celui-ci dormait d'un sommeil profond. Il se retourna plusieurs fois sans se réveiller. Ce n'est qu'au coucher du soleil qu'il ouvrit les yeux et se redressa.
Lu Ban s'approcha de lui, s'agenouilla et dit:
- Grand Maître, je suis venu afin de vous prendre pour Maître. Recevez-moi, s'il vous plaît.

- Comment t'appelles-tu? Et d'où viens-tu? demanda le vieux.

Je m'appelle Lu Ban, je viens du village de Lujiawan, à plus de 5000 kilomètres d'ici.

Le vieux continua à l'interroger:
- Pourquoi me prendre pour Maître?

- Parce que vous êtes le grand Maître charpentier.

- Je vais te poser des questions, si tu y réponds bien, je t'accepterai. Sinon, ne m'en veux pas, tu n'auras qu'à t'en retourner, reprit le vieux après un moment de réflexion.

Le coeur battant, Lu Ban dit:
- Si je ne réponds pas bien aujourd'hui, je le ferai demain. Vous me prendrez le jour où mes réponses vous satisferont!

- Combien y a-t-il de poutres transversales principales et auxiliaires, de faîtages, de solives dans une maison de trois pièces? demanda le Maître.

- Trois poutres transversales principales et trois auxiliaires; vingt faîtages gros et petits; cent solives. Je les ai comptés quand j'avais cinq ans, répondit tout de suite Lu Ban.

Approuvant d'un léger signe de tête, le Maître demanda encore:
- On peut apprendre une méthode en trois mois ou en trois ans. Quelle est la différence?

Après un moment de réflexion, Lu Ban répondit:
- Celui qui l'apprend en trois mois ne la connaît que par les yeux, tandis que celui qui l'apprend en trois ans la retient par coeur.

Faisant un autre léger signe de tête, le Maître posa la troisième question:
- Un Maître charpentier avait deux disciples. Avec leurs haches, l'un a gagné une montagne d'or, l'autre a gravé son nom dans le coeur du peuple. Quand tu seras expert dans ton métier, quel exemple suivras-tu?

- Le deuxième, répondit Lu Ban.

- Bon, puisque tu as bien répondu à toutes mes questions, je te prends comme apprenti à condition que tu utilises mes instruments qui n'ont pourtant pas servis depuis très longtemps. Va d'abord les réparer! dit le vieux sans poser d'autres questions.

PARTIE VII

Lu Ban se redressa, transporta la caisse à outils près d'une pierre à aiguiser et sortit les outils l'un après l'autre. Il les examina: la hache était dentelée, la scie n'avait plus de dents, deux ciseaux étaient abîmés et rouillés.
Sans attendre un instant, il se mit au travail. Il aiguisait les instruments jour et nuit, si bien qu'il avait mal aux épaules, des ampoules aux mains, alors que la pierre à aiguiser était devenue creuse. Au bout de sept jours et sept nuits, tous les instruments furent réparés et étaient devenus tranchants et brillants. Lu Ban les présenta à son Maître, qui ne fit qu'un signe de tête sans prononcer un seul mot.

- Pour voir si la scie coupe bien, essaye de couper cet arbre qui a cinq cents ans, dit-il enfin.

Lu Ban s'approcha de l'arbre, le regarda:
"Comme il est gros, il faudrait deux personnes pour l'entourer; comme il est haut, sa cime touche presque le ciel."

Il commença à le scier. Ce n'est que douze jours après que l'arbre fut coupé. Lu ban prit la scie et alla voir son Maître.

Le vieux ordonna de nouveau:
- Pour voir si ta hache marche bien, taille dans cet arbre une poutre. Il faut qu'elle soit parfaitement lisse et ronde.

Lu Ban se remit au travail. Il coupa les uns après les autres les branches et les noeuds de l'arbre et douze jours après, la poutre fut prête. Il vint voir son Maître. Ce dernier dit alors:
- Ce n'est pas encore suffisant; Pour voir si tes ciseaux tranchent bien, creuse sur la poutre 2400 trous: 600 carrés, 600 ronds, 600 triangulaires et 600 rectangulaires.

Prenant ses ciseaux, Lu ban se mit à creuser et les copeaux de bois voltigeaient. Il travailla avec ardeur pendant 12 jours et les 2400 trous furent percés.

PARTIE VIII

Cette fois-ci, le Maître fut satisfait. il quitta sa chaise, prit les ciseaux, essuya la sueur sur le visage de Lu >Ban, et fit son éloge:
- Mon cher enfant, tu n'as pas peur des difficultés. Je t'apprendrai tout ce que je sais.
Puis il emmena Lu Ban dans la pièce de l'ouest. Une fois entré, Lu Ban ouvrit grand les yeux et eut à peine le temps d'embrasser le tout d'un regard: il y avait partout des maquettes: maisons, pavillons, kiosques, ponts, pagodes, chaises, banc, malles, meubles, qui étaient tous aussi beaux que raffinés.

Le Maître dit en souriant:
- Démonte-les, puis remonte-les; et tu seras parfait dans ton métier. Apprends bien toi-même, je ne reste pas auprès de toi.

Cela dit, il se retira. Lu Ban prit un modèle et l'examina attentivement, ne voulant pas le lâcher. Il démonta, puis remonta toutes les maquettes trois fois de suite, deux fois de plus que son Maître avait demandé.

Il restait tous les jours à la maison, oubliant de manger et de se reposer. Tous les soirs, avant de dormir, le Maître venait le voir: il travaillait toujours. Chaque fois que le vieillard le pressait de dormir, il répondait oui, mais ne laissait toujours pas son travail.

PARTIE IX

Après trois ans de dur travail, il connaissait bien son métier. Pour voir son niveau, le Maître avait détruit tous les modèles. Les plans de toutes les maquettes étant profondément gravés dans sa mémoire, Lu Ban les refabriqua tous. Le Maître lui demanda aussi de faire de nouveaux modèles selon ses conceptions, il arriva à les monter, et le vieil homme en fut bien satisfait.
Un jour, le Maître fit venir Lu Ban et lui dit avec regret:
- Mon disciple, voilà trois ans que tu es ici, et tu es maintenant bien habile. Il est temps pour toi de retourner chez toi!

En entendant cela, Lu Ban en fut déçu et répliqua:
- Non ma technique n'est pas encore parfaite, je voudrais apprendre encore trois ans!

Souriant, le vieux dit:
- Tu t'apprendras toi-même. Il faut que tu partes aujourd'hui!

Voulant lui offrir un cadeau, le Maître réfléchit et dit:
- Garde la hache, la scie et les ciseaux que tu as réparés!

Regardant son Maître, Lu Ban sanglotait:
- Et qu'est-ce que je peux vous offrir?

Eclatant de rire, le Maître répondit:
- Je ne veux rien de toi. Il te suffit de ne pas nuire à ma réputation.

Lu Ban retint ses larmes, fit ses adieux à son Maître et se mit en route.

Sur le chemin du retour, il ne revit pas la vieille dame, ni le jeune pêcheur, ni le vieux bûcheron qui l'avaient aidé.

Pour les remercier, il construisit un grand temple au pied de la montagne Zhongnan, un pont sur la grande rivière et une haute pagode sur la grande montagne. On dit qu'ils existent toujours.

Rentré chez lui, il rejoignit ses parents. Avec les instruments offerts par son Maître, et en suivant ses recommandations, Lu Ban fit oeuvre utile et laissa beaucoup d'histoires émouvantes.

Les hommes des générations suivantes l'appelèrent avec respect le Premier Maître des Charpentiers.

Fin de cette Histoire.
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